Sioux le regard des présidents : Custer State Park

Lundi 03 juillet 2017

Réveil en fanfare qui va donner le ton de la journée à Custer SP. Alors que nous sommes en plein petit déjeuner, un énorme bison solitaire décide de traverser le camping. Respectueusement et apeurés, tout le monde s’écarte sur le passage d’une des bestioles les plus dangereuses de l’ouest. L’animal à la taille impressionnante prend ses aises sur une toile que des campeurs – maintenant réfugiés dans leur camping-car – étaient en train de replier. Après les avoir crédité d’un odorant présent gastrique, le bison s’éloigne vers de nouvelles aventures.

Il a payé son emplacement celui-là ?

L’objectif de notre journée est une performance sportive de premier plan. Il s’agit de gravir le point culminant du Dakota du Sud. On se calme, l’ascension du Black Elk Peak (précédemment nommé Harney peak), avec ses 11 kilomètres pour 400 mètres de dénivelé est bien loin de nos standards coloradiens. Nous débutons la randonnée au Sylvan Lake, dans la partie nord du parc. Ce lac artificiel au rivage orné d’imposants blocs de granit présente un cadre idyllique. Tandis que nous en faisons la tour, nous apercevons d’ailleurs une cérémonie de mariage en préparation. S’ils vont terminer leur vie dans le péché dans la journée, d’autres pécheurs s’en donnent à cœur joie sur les rives du lac, taquinant la truite sous le soleil.

Voilac Sylvan

Chemin 9 à l’aller, 4 au retour.

Nous empruntons un large chemin qui s’éloigne du lac en s’élevant modérément. Très rapidement, nous distinguons les massifs rocheux emblématiques des Black Hills qui émergent des forêts de résineux. Un beau ciel bleu, de petites fleurs dans les fossés rendent la balade bucolique et sereine. Une telle quiétude n’a pas toujours été observée dans ces montagnes (admirez cette transition !). Montagne sacrée pour les indiens Lakota, les lieux ont été le théâtre de conflits entre l’homme blanc et ses prédécesseurs natifs.

Granité de cailloux.

Ne marchez pas sur les plates-bandes.

Instant Wildlife @Pascal

Alors que le territoire avait été protégé par le traité de Laramie, l’expédition des Black Hills du général George Custer et la découverte d’or dans les montagnes ont changé la donne. S’en est suivie une période tendue entre les tribus indiennes, les prospecteurs et la cavalerie de l’armée américaine. La bataille de Little Big Horn (défaite de l’armée US marquée par la mort de Custer) ou le massacre des civils à Wooden Knee seront les apex sanglants de ces conflits. Comme souvent, les indiens finiront expropriés de leurs terres par la cupidité des colons. Si l’on ne trouve plus d’or aujourd’hui dans les collines noires, les panoramas qui s’offrent à nous sont de véritables trésors.

Présent enchanteur, passé terrible.

Nous pénétrons dans la Black Elk Peak Wilderness area. Cet espace protégé adjacent au Custer SP a été vraisemblablement le théâtre d’incendies il y a quelques temps. La nature reprend petit à petit ses droits en commençant par une dense végétation au ras du sol. Quelques troncs d’arbres calcinés, vestige du feu, restent en marqueurs de la catastrophe. Cela permet au moins d’avoir une belle vue dégagée alors que la pente se fait légèrement plus sévère.

Ne tombez pas dans le panneau.

La nature reprend ses droits.

Pas un chas sur ces aiguilles.

Nous arrivons en vue de la tour d’observation des feux qui marque le sommet du Black Elk Peak. On a littéralement une vue à 360° sur l’ensemble du massif. On comprend un peu mieux l’appellation des Black Hills – les collines noires. Vu d’en haut, le vert sombre des pins se confondent et s’obscurcit, donnant l’impression qu’effectivement, les reliefs sont couverts d’un voile sombre. En parlant de sombre, le mignon petit nuage qui surplombait le sommet est devenu gros et bien menaçant. Quelques gouttes nous frappent et nous rentrons donc nous mettre à l’abri dans la tour. Nous remarquons des morceaux de tissus accrochés au pic. Ce patchwork donne des airs de temple tibétains couvert de rubans de prière multicolores. Nous sommes après tout sur un territoire sacré.

Les Black Hills.

En haut du Black Elk Peak.

Pas le temps de niaiser, ce qui jadis n’était qu’un petit nuage sombre est devenu une étendue noire. Le roulement du tonnerre est terrifiant. Si la tour offre un abri éphémère contre les gouttes, elle se trouve au milieu d’un espace désert. Nous prenons donc la décision de redescendre rapidement. Cela ne fait même pas deux minutes que nous sommes de retour sur le chemin que déjà la pluie s’intensifie, les éclairs illuminent le ciel et une grêle soutenue commence à s’abattre sur nous. C’est la débandade. Au pas de course, dégoulinants, on se perd de vue. Alice et Pascal, les moins couverts ont pris un peu d’avance. Ce sont une Hélène et une Maïca trempées que je retrouverai dans notre fuite. Nous prenons le sentier que j’avais prévu en pataugeant dans la rivière qui était le chemin encore une heure auparavant. Les paysages sont blanchis par les petites billes de glace, et il fait froid. Nous n’avons qu’un rapide regard vers les majestueuses aiguilles granitiques de Cathedrale Spire qui étaient pourtant annoncées comme l’un des points d’orgue de la balade.

Cathedrale Spire.

Petit glaçon ou petite bille ?

Nous terminons la randonnée d’un pas soutenu, toujours sous la menace des éléments. Les pas sont rythmés par le flotch flotch de nos chaussures inondées. Nous retrouvons Pascal et Alice au lac. Ils ont pour leur part suivi le même chemin qu’à l’aller plus court. Ils se réchauffent tant bien que mal sous les sèches mains des toilettes. Sans perdre de temps, nous embarquons dans la voiture. Une fois au campement, chacun file sous une bonne douche chaude sans demander son reste. Le camp se transforme en étendoir géant alors que l’on s’attelle à la préparation d’un repas chaud qui va apporter un peu de réconfort. Pascal a même droit à son bougie sur un gâteau pour marquer son happy birthday. Nonobstant les intempéries, la randonnée vers Black Elk Peak reste une belle aventure. Le point de vue au sommet est assez exceptionnel. Le retour par Cathedrale Spire avait l’air sympa, avec l’alliance du vert des pins et du gris des roches. Une belle manière de découvrir Custer SP autrement que par les routes scéniques.

L’accessoire indispensable du camping : la corde à linge.

De voiture, il en est d’ailleurs question pour terminer la journée. Nous allons en effet parcourir la route qui forme une boucle dans toute la partie sud du parc : la wildlife loop road. Les forêts laissent place aux paysages de prairie. Rapidement, les maîtres des lieux apparaissent en nombre. Les bisons paissent paisiblement de chaque côté de la route, voir sur l’asphalte. En ce début d’été, les veaux de l’année sont toujours bien reconnaissables. Ils s’amusent entre eux ou cherchent à quel pis se vouer. Placides, les vieux individus nous toisent, tranquillement allongés dans la poussière.

Le seigneur des plaines.

La harde de Custer SP est l’une des plus grande du pays ; à tel point que sa taille après les périodes de vêlage menace l’éco-système du parc. Le Buffalo Round Up est organisé chaque septembre. Les cowgirls et cowboys des environs affluent avec leurs chapeaux, leurs montures et leurs lassos. Ils exercent leurs talents pour réunir les animaux, marquer les jeunes comme appartenant à l’état du South Dakota et sélectionner les bêtes qui seront mises aux enchères et exfiltrées du parc. Un spectacle qui attire chaque année des milliers de visiteur. Pour le moment, pas d’inquiétude pour les bovidés, on observe donc les ruminants ruminer.

La relève est prête.

XXX @Pascal

Un peu plus loin, bison futé est formel, de nouveaux bouchons arrêtent notre progression. Et cette fois-ci, ce sont des ânes qui vont nous rendre chèvres. Initialement, ils ont été amenés dans le parc pour aider les touristes à effectuer l’ascension du Black Elk Peak. L’activité déclinant, ces « burros » ont tout simplement été remis en liberté dans le parc. Aujourd’hui, les bourricots sont devenus vagabonds et mendient nourriture et caresses aux voitures du parc (c’est une figure de style, c’est aux passagers des voitures que les ânes s’adressent en réalité). Entre deux dos d’ânes, on observe aussi les beaux paysages du parc dans la lumière déclinante.

Le long de la Wildlife Loop Road.

Quelques roches rouges.

Burro de travail à la retraite.

Nous bouclons la boucle par un passage au nord plus forestier où nous parvenons tout de même à surprendre quelques belles aux yeux de biches. Pour en voir quasi quotidiennement à Boulder, il faut bien avouer que l’émerveillement est un peu moins intense. Un dernier arrêt sur les bords de Legion Lake nous permet de faire les stocks de petits bois et de glaçons (il faut bien rafraîchir les bières pour la soirée).

Au bord du Legion Lake. @Pascal

Hirondelle rustique et pensive. @Pascal

La routine. @Pascal

La journée se termine comme elle a commencé au Blue Bell Campground. Petit aparté, les emplacements sont spacieux, assez privatifs, avec les équipement usuels (trou à feu, petit barbecue et table), les douches et sanitaires sont gratuits, un petit commerce se trouve à l’entrée et des programmes des rangers permettent d’animer quotidiennement les soirées. Au menu du soir pour l’anniversaire de Pascal : ribs à la sauce barbecue, champignons farcis, petits légumes et ce qui reste de gâteau d’anniversaire. C’est fatigué et repus que nous nous endormons.

« Préparez le repas, je vérifie que le feu ne s’enfuit pas ».

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